NOTE DU PROGRAMME DE MASTER ET DOCTORAT EN ANTHROPOLOGIE SOCIALE DU MUSÉE NATIONAL (PPGAS-UFRJ)19/9/2018 Note du Programme de doctorat en Anthropologie Sociale du Musée National (PPGAS) sur l’incendie de son siège dans l’ancien palais impérial. (traduction en français de la note (version longue) diffusée en portugais) : L’année où nous fêtons les 200 ans de la fondation du Museu Nacional et les 50 ans de création du Programme de post-graduation en Anthropologie sociale (PPGAS/MN/UFRJ) s’est déclaré un incendie ravageur qui a dévasté le palais de Sao Cristovao et a projeté l’institution dans une phase inédite de son existence. Le Musée National était pleinement conscient des risques auxquels était exposé le patrimoine. Ce bâtiment du XVIIIème siècle était le lieu d’une vie scientifique multiforme en plein essor, avec des collections scientifiques, des archives historiques, des laboratoires, des bibliothèques, des salles de cours. Pour cette raison, depuis des décennies, nous luttions tous pour obtenir des espaces externes, permettant le déplacement d’une partie de ces activités et pour l’impérieuse restauration structurelle nécessaire au palais. De nouveaux bâtiments, relativement proches du siège du musée, ont été envisagés, dont une partie appartenait notamment à l’Etat fédéral. Ces initiatives ayant échoué, ont été construits un ensemble d’annexes localisées dans le jardin botanique du parc qui entoure le palais: d’abord une bibliothèque centrale, puis l’immeuble consacré aux départements des vertébrés et de la botanique. Parallèlement, des interventions d’urgence ont été assurées, destinées à assurer l’occupation du palais, comme la restauration des toitures. A partir de 2008, avec la limitation des ressources disponibilisées par la PETROBRAS, l’unique entreprise nationale susceptible d’accueillir les projets dans le cadre du système PRONAC/MINC (Ministère de la Culture), le Musée a été obligé de changer de stratégie pour maintenir son programme institutionnel. Avec l’appui de l’Association des Amis du Musée National, ont été sollicités des amendements à la loi de finances du gouvernement fédéral. En 2013 un amendement du groupe parlementaire de Rio de Janeiro a été approuvé, d’une valeur de 20 millions de réais, mais ces fonds n’ont jamais été concrètement destinés à cette fin. L’échec de cette initiative nous a amené à engager des négociations en 2015 avec la Banque Nationale du Développement Economique et Social (BNDES), avec la participation du Musée, de l’UFRJ et l’Association des Amis du Musée (SAMN). Malgré d’immenses difficultés bureaucratiques, la Banque a accordé une aide de 21 millions de réais pour la revitalisation institutionnelle et la restauration patrimoniale, dont un projet de système de prévention d’incendie – pièce essentielle de la sauvegarde du patrimoine de l’institution. L’accord fut signé le 06 juin de cette année, lors des commémorations du bicentenaire de l’institution. Les fonds auraient dû être disponibles juste après les élections d’octobre. Partie intégrante du Musée, le PPGAS aurait dû bénéficier de ce contrat et occuper un espace plus vaste, moderne, du même format que la bibliothèque restaurée. L’incendie est survenu le soir du 2 septembre. Pendant toute cette période le PPGAS s’était affirmé comme institution d’excellence dans sa spécialité, recevant systématiquement la note maximale des évaluations de la CAPES (organisme du Ministère de l’Education Nationale brésilien). Sa production fait état de 800 dissertations de masters et thèses de doctorat. Grâce à la variété et la créativité des projets individuels et collectifs de ses enseignants et des ses étudiants, le programme est devenu une des institutions plus prisées du pays au sein des sciences humaines. Ces centaines d’anciens étudiants sont aujourd’hui dans des universités brésiliennes, et parfois dans des universités étrangères, diffusant le modèle de rigueur académique de leur formation. Les échanges de coopération internationale avec les meilleures institutions d’anthropologie et de sciences sociales témoignent de son prestige. La revue Mana. Estudos de Antropologia Social a très vite atteint les meilleurs classements nationaux et internationaux, augmentant la notoriété et la capacité d’irradiation scientifique de notre institution. La bibliothèque Franscisca Keller figurait parmi une des meilleures bibliothèques du Brésil et de l’Amérique Latine, comprenant plus de 37 mille ouvrages (la liste a été préservée). La coopération internationale est un des points forts de notre histoire et depuis le début le PPGAS a reçu des étudiants, des chercheurs et de professeurs des pays les plus divers, notamment d’Amérique Latine. La connaissance produite par notre institution a été une ressource pour les débats à l’origine de politiques publiques, notamment à l’égard des droits civiques des divers segments sociaux. Depuis sa création le PPGAS a participé activement à des enquêtes sur la paysannerie, les différents groupes urbains et tout ce qui concerne la recherche ethnologique; ce qui ne l’a pas empêché d’être attentif aux transformations sociales et aux débats et demandes de droits de la part des divers groupes et mouvements sociaux. Plus récemment nous avons participé activement aux actions affirmatives, élargissant l’accès aux études de haut niveau de jeunes issus de fractions démunies ou stigmatisées. Ce faisant nous renforçons notre engagement pour pratiquer une connaissance de pointe largement offerte par des institutions publiques et démocratiques. En même temps nous souffrons de réductions drastiques de nos budgets, comme toutes les institutions publiques de formation et de recherche. Cette précarité ne peut que s’aggraver avec l’amendement constitutionnel 95, imposé par la nouvelle équipe dirigeante depuis 2016, qui bloque les dépenses publiques pour 20 ans dans les domaines vitaux de l’éducation et de la santé. Actuellement, le Musée, ravagé par l’incendie et la perte de son précieux patrimoine historique, artistique, bibliographique et scientifique, tente de rétablir les conditions de sa vitalité scientifique d’un commun élan avec tous les collègues des autres départements. Même la disparition de notre bibliothèque est temporaire, car de nombreuses initiatives solidaires laissent présumer sa reconstitution systématique. Nous nous mobilisons pour constituer une réseau formel d’anciens étudiants grâce à leur filiation à l’Association des Amis du Musée National; notre plus grande richesse est constituée par ceux qui y ont appris à travailler. Leur mobilisation ne peut que renforcer l’engagement envers une connaissance ouverte à toutes les avancées scientifiques produite dans le cadre d’une université publique et de qualité. Les centaines de manifestations de solidarité et d’aides de la part d’individus et d’institutions du monde entier sont venus réconforter les enseignants-chercheurs, les fonctionnaires et les étudiants et renforcer leurs dispositions à lutter pour la rennaissance du Musée et de notre programme, en dépit du mépris des dirigeants brésiliens envers l’histoire, la culture et la science.
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